Découverte et installation du premier camp de base

Boa

Hier soir, nous avons dîné dans une petite auberge lorsqu’un boa est apparu glissant tranquillement sous la toiture à hauteur de tête. Tout le monde s’est approché de la bête avec intérêt sauf les locaux qui continuaient leurs activités. Certains ont alors posé la question de la raison de leur réaction. Nous avons alors compris qu’ils laissent faire les boa car ils leur chassent les souris et rats notamment dans les greniers.
Plus tard, quelques un se sont levés. Ny, notre spécialiste des crocos, a invité les autres herpétologues (Christopher, Emlyn, Pierre-Olivier) ainsi qu’Evrard et Bruno (le cadreur) à le suivre pour ce que l’on appelle communément du Croc Watching ou plus scientifiquement un comptage des crocodiles sur les rives du fleuve Mangoky.
Embarqués sur deux pirogues transformés en catamaran, nos aventuriers et chercheurs sillonnent les berges du fleuve à l’aide d’un projecteur alimenté par…la batterie du 4×4. L’ambiance joviale bat son plein sur ce « loveboat », lorsque Ny aperçoit des yeux sous son faisceau lumineux… deux petits crocos. Une petite prospection infructueuse plus loin, c’est déjà l’heure du demi-tour, ils sont partis depuis une heure et demi. Tout à coup, le faisceau lumineux se fait moins puissant, c’est la brume qui arrive et qui flotte à quelques centimètres de l’eau.
Bruno, notre réal’ capture ces instants magiques et peu ordinaires mais quelques secondes plus tard, l’orage éclate et ce sont des trombes d’eau qui s’abattent sur eux. Un orage incroyable accompagné de quelques rafales de vent! Et alors qu’il faisait plus de 25°C et qu’ils suaient au moindre mouvement, les voilà frigorifiés, recroquevillés sur eux-mêmes et trempés jusqu’aux os. Et oui, la gore-tex est restée à Beroroha. Une situation cocasse qui les a fait beaucoup rire apparemment. Gelés mais heureux, le récit passionné de cette aventure fera des envieux…

4x4

Le lendemain, parti à l’aube de Beroroha, nous roulons sous une chaleur écrasante, ballottés à l’arrière des véhicules.
Les arrêts sont nombreux. Les pelles et « coupe-coupe » s’agitent avec dextérité, les corps suent, il faut parfois beaucoup d’efforts pour franchir certains obstacles.
Cette piste que nous empruntons reliait autrefois les villages alentours à une piste d’atterrissage d’une ligne intérieure d’Air Madagascar. Aujourd’hui, les glissements de terrain et autres aléas la rende quasi-inaccessible mais autrefois, cette piste fonctionnait chaque semaine et le village de Beroroha était très actif et riche. Mais il y a 25 ans, les problèmes économiques de la compagnie nationale ont fini d’isoler la région.
Nous passons devant trois poteaux plantés là, au milieu de nul part…c’était la tour de contrôle. La nature semble avoir repris ses droits. Nous traversons d’immenses espaces pelés, ravagés par les feux inconscients. Un paysage presque désertique, parsemé ci et là d’arbres chétifs rescapés du ravage, et de jeunes pousses d’herbe verte. La désolation en est d’autant plus grande que la terre est stérile, empêchant toute tentative de reboisement naturel.

En début d’après midi, nous rejoignons Evrard et Max partis en reconnaissance.
L’enthousiasme perçu en dit long sur l’endroit que nous allons trouver. Nous découvrons avec surprise et ravissement la beauté des lieux. La rivière -frontière de la nouvelle réalité qui s’offre à nous- formée de multiples piscines naturelles, laisse présager des bains bien mérités ! On ne pouvait pas espérer mieux après ce long périple!
Dernier effort. Le camp basé en contrebas, nous déchargeons les véhicules sous un soleil de plomb, l’équipe fourmille, les peaux rougissent. Les tentes, bâches et autres hamacs poussent éparpillés dans la forêt à la manière de champignons.

A 20h, les entomologistes et herpétologues quittent déjà les lieux pour une première prospection nocturne des environs du camp (Coordonnées GPS : S 21° 35′ 45″ – E 45° 06′ 47″). David et Adeline notamment ont monté un piège lumineux pour attirer les insectes à quelques mètres des tentes. Cauchemar, très mauvaise idée, enfer… tous les qualificatifs y sont passés pour décrire ce drap blanc éclairé par une lampe à UV. Notre petit coin de paradis s’est en effet retrouvé envahi en quelques minutes d’une orde de millions de coléoptères coprophages. Le drap couvert de cette petite bête aux allures de coccinelle, ainsi que nos habits, nous sommes contraints de nous réfugier dans nos tentes. Il est 21h, il fait 30°, le taux d’humidité est de 70%, enfermés dans nos tentes et en sueur, nous attendons la pluie et le sommeil.

Chenille

La carte du jour avec les points caractéristiques :

7 réflexions au sujet de « Découverte et installation du premier camp de base »

  1. Salut Nicoco,

    Les photos sont magnifiques tu dois vivre une expérience incroyable.
    En tout cas profite bien ici tu ne rate rien mais tu nous manques on a hâte que tu reviennes et surtout entier.
    Les échantillons sont là ils t’attendent lol.
    Bon eh bien prend soin de toi et à bientôt.

  2. C’est vraiment super de pouvoir suivre cette expédition avec ces superbes images et ces beaux commentaires, bravo !!!

    Anne-Laure, la petite soeur de Bruno (cadreur) qui l’embrasse.

  3. Voilà, je vais mettre en lumière (Pas UV, trop peur des coléoptères cropophages) mon ignorance mais peut être ne suis je pas le seul à me faire cette réflexion.
    Les locaux brulent la forêt, OK.
    Mais lorsque on brûle, il reste des cendres, donc du Carbone. le Carbone c’est super fertilisant non? alors pourquoi ça pousse plus? Ne parle t’on pas de culture sur brûlis? Est ce que c’est du fait d’un déséquilibre Carbone-Azote? Est ce une affaire de temps? (le temps des hommes et des besoins des générations contre le temps de la croissance des arbres)

    • Bonjour Mathias,

      Tu as raison, effectivement lorsque l’on brûle des végétaux, il reste du carbone, mais encore faut il que ce carbone reste là où les végétaux ont été brûlé… Et c’est là, à mon sens, une grande partie du problème. Dans ces régions, y compris en sous-bois, la couche de sol est extrêmement mince, dessous ce n’est que du sable et du gré. Sans couvert végétal, sans les racines qui ancrent le sol, sans les feuilles qui amortissent l’eau qui tombe à très grosses gouttes, sans cette petite couche de litière, à la première pluie tropicale (très fréquentes entre novembre et avril), tout est lessivé, le gré et le sable sont mis à nu… Et là, pour les plantes cela devient beaucoup plus difficile de germer dans un univers presque uniquement minéral. A cela ajoutons aussi un peu d’érosion éolienne et on comprends comment des zones même faiblement dense en végétaux se retrouvent quasiment désertiques après une année seulement (la saison sèche et ses brûlis suivi d’une saison des pluies qui lessivent tout). Evrard ajoutera certainement encore quelques précisions à ces propos.

      Emeric

  4. Merci de nous faire vivre ce beau voyage. Votre progression est super bien décrite et j’arrive plus à lâcher Google Earth… Continuez à nous faire rêver. On souhaite à toute l’équipe de faire de cette épxé les racines de la préservation du Makay!

  5. C’est la première fois que je peux suivre ainsi les aventures d’une expédition en direct, quel plaisir et que d’évocations séduisantes ! Les textes sont instructifs et bien troussés, les photos pleines de vie, merci !

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